Social impact bonds: une révolution en matière de financement des politiques sociales?

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Un éclairage de Marcel Hipszman pour la Recma, suite à la publication par le Commissariat général à la stratégie et à la prospective d'un rapport sur l'"impact investing". Une des applications les plus marquantes de la Big Society, le projet politique majeur du gouvernement britannique qui vise par une réduction drastique de la sphère publique à transférer à la société civile (charities, entreprises sociales , communautés …) une partie des responsabilités jusqu’ici assumées par un un Etat devenu impécunieux et présumé moins efficace, les social impact bonds(SIB) ont assez rapidement suscité un grand intérêt non seulement au Royaume Uni où une douzaine de projets sont en cours, mais aussi aux Etats Unis à NewYork et dans d’autres états(Massachusetts, Illinois, Texas, Maryland, New Jersey), au Canada et en Australie. Les britanniques l’ont fait figurer à l’ordre du jour du G8 en le ministre Benoit Hamon qui y participait a même publiquement exprimé son intérêt pour le sujet.

De quoi s’agit-il ?

Le SIB est un nouveau mode de financement des services publics qui associe financement public et privé dans une logique de résultat. La nouveauté réside dans le fait que les finances publiques au lieu d’être engagées ab initio ne le sont qu’après coup au vu du résultat

 

  1. les fonds sont d’origine privée (fondations, entreprises, philanthropes…) et sont affectés à la réalisation d’un projet social (réinsertion de délinquants , de personnes sans abris, d’enfants ou d’adolescents déshérités…).
  2. La réalisation du projet est confiée à une association prestataire habilitée.
  3. Au terme de l’opération, les financeurs récupèrent les fonds investis augmentés d’une rémunération si – et seulement si l’objectif fixé avec les pouvoirs publics est atteint dans les conditions prévues au départ. Encas d’échec, Ils assument le risque en totalité.

 

L’intérêt pour la puissance publique c’est de permettre d’apporter éventuellement une solution au moins partielle, à un problème d’une gravité particulière et couteux pour la puissance publique . La première opération du genre est menée dans la prison de Peterborough où est actuellement expérimentée avec un groupe de détenus une méthode innovante de prise en charge et de suivi dont l’objet est de réduire le taux de récidive avec pour résultat escompté, en cas de réussite une économie des deniers publics. En cas d’échec, le coût de l’opération reste à la charge des seuls investisseurs privés.

L’intérêt pour l’association prestataire c’est qu’elle n’a pas à engager de dépenses sur ses ressources propres pour financer l’opération. le financement qui lui est assuré, lui permet aussi de poursuivre son activité dans son domaine de compétence à un moment où du fait de la réduction des dépenses publiques elle pourrait être contrainte de la réduire ou éventuellement même de cesser toute activité.

L’intérêt enfin pour le ou les investisseur(s) en cas de réussite c’est de récupérer les fonds investis plus leur rémunération sur la période.

Le produit n’est donc pas suffisamment attractif pour des investisseurs à la recherche de fort rendement, mais assez pour y intéresser d’autres moins gourmands d’autant que la rémunération peut être relativement confortable, à laquelle s’ajoute la satisfaction d’avoir contribué a la solution d’un problème social difficile et le bénéfice associé à la réussite du projet en terme d’image.

Conclusion

Les Social Impact Bonds et plus largement le Social Investment peuvent-ils être, comme l’assure David Cameron, "cette grande force pour le changement social à l’échelle de la planète", Wall Street et la City sont-ils prêts à s’y investir comme les y invite Iain Duncan Smith le ministre britannique de la Justice qui doit faire face à une réduction de son budget d’ ¼ sur les 4 prochaines années. Plus dubitatif le journal le Guardian s’interroge sur la capacité des Social Impacts Bonds à résoudre les problèmes sociaux les plus ardus qui sont en même temps les plus difficiles à financer.

Les Social Impacts Bonds sont-ils au contraire un nouveau moyen pour privatiser les services publics, comme l’affirme la National Union , un syndicat des salariés du service public au Canada qui s’insurge contre leur introduction .

Même si le propos est intéressé, il n’est pas totalement sans fondement dans la mesure où il s’inscrit dans une démarche qui trouve dans l’austérité budgétaire argument pour réduire la part des dépenses publiques consacrées au domaine social.

En Grande Bretagne en tout cas l’enjeu est de taille puisque vient d’être créé à Londres le premier marché de finance sociale au monde avec une capitalisation boursière de £ 500 millions , £700 millions prévus en octobre.

Pour le 3rd sector (l’économie sociale anglaise, grosso modo) c’est une opportunité qui vient compenser pour partie la réduction des dépenses publique que subissent de plein fouet les charities en particulier , mais qui peut aussi lui permettre de prendre une plus large place. Cela suscite néanmoins des interrogations quant au bénéfice que le secteur pourra réellement en tirer d’autant qu’il risque de se trouver éventuellement concurrencé par des acteurs purement lucratifs.

Les réserves que suscitent les Social Impact Bonds en Grande Bretagne même, leur inscription dans une approche politique des rapports entre l’Etat et la société civile encore assez éloignée de celle qui a cours sur le continent et en France en particulier ne conduisent pas nécessairement à la condamnation sans appel de l’Impact Investing comme semblent le faire les auteurs du rapport du Commissariat Général à la Stratégie et à la Prospective.

La mesure de l’impact social au même titre que l’impact environnemental par exemple est une nécessité. Elle est aujourd’hui mieux admise dans le secteur de l’ESS mais exige des instruments adaptés, y compris dans la dimension financière.

Les Social Impact Bonds représentent de ce point de vue une initiative intéressante dans la mesure où elle peut susciter un apport de ressources de financement additionnel stable et non spéculatif, sous réserve d’ un encadrement régulé.

L’avenir dira s’ils sont –au moins pour ce qui concerne la Grande Bretagne-la révolution annoncée.

Marcel Hipszman