Droit comparé des coopératives européennes

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David Hiez (dir.). Larcier, collection de la faculté de droit, d’économie et de finance de l’université du Luxembourg, 2009.

A l’initiative (et sous la direction) de David Hiez, professeur et directeur des études du bachelor académique en droit à l’université du Luxembourg, les éditions Larcier ont publié, en 2009, un « petit » ouvrage de droit comparé des coopératives européennes. Réunissant des présentations (en français et en anglais), parfois inégales, des principales législations coopératives (Allemagne, Royaume-Uni, France, Espagne, Italie, Grèce, Finlande, Belgique et Luxembourg), il propose des « clés pour comprendre ce qui se passe dans ces pays ». Les auteurs (universitaires, chercheurs, avocats) ont répondu à la demande de rédiger une présentation générale en insistant sur un trait saillant. Il s’agit donc d’une introduction, l’ouvrage n’ayant pas pour ambition de présenter des développements détaillés sur chaque type de coopérative. Les lecteurs avides de tout savoir sur les droits coopératifs trouveront dans les bibliographies nationales les sources adéquates.

Regain d’intérêt académique pour les coopératives

Cette initiative est révélatrice du renouvellement de l’intérêt des chercheurs, dans la plupart des pays, pour les coopératives. Comme le souligne la présentation de l’ouvrage en quatrième de couverture, « depuis un siècle, les recherches universitaires sur le sujet s’étaient éteintes ».
Les « interrogations sur le modèle capitaliste » et la création de la société coopérative européenne « ont ravivé l’image des coopératives, qui avaient connu leur heure de gloire à la charnière des XIXe et XXe siècles ». Alors que la crise économique, sociale et environnementale touche la planète entière, les pratiques coopératives peuvent apparaître comme « une alternative au capitalisme financier ». Reste que les travaux de droit comparé en matière de législations coopératives sont très insuffisants et que, plus de cent soixante ans après les équitables pionniers de Rochdale, la compréhension des spécificités nationales est extrêmement limitée au sein même du mouvement coopératif européen, et ce sans parler des autorités.
Justement, petite bizarrerie de l’ouvrage, c’est au rayon « belge » que l’on peut lire la petite histoire de l’initiative prise par vingt-huit tisserands de Rochdale (du côté de Manchester, en Angleterre) d’ouvrir une boutique coopérative, financée par « un petit capital alimenté par les cotisations minimes, mais régulières des sociétaires ». Ce fut le point de départ et la référence du rayonnement de la coopération de consommation sur tout le continent européen.

Des questionnements qui excèdent le cadre national

Ce qui est intéressant dans ce panel, c’est de voir comment les thématiques communes à tous les mouvements coopératifs européens sont abordées nationalement. Ainsi, on peut comprendre comment les coopératives allemandes ont géré les conséquences de l’adoption des normes comptables internationales (IAS-IFRS). Autre question d’importance, celle de l’émergence de l’entreprise sociale, avec notamment le développement des community interest companies (CICs) au Royaume-Uni et celui des coopératives sociales en Italie. La question des liens entre coopératives et politiques publiques, voire parfois leur « instrumentalisation » par les gouvernements (en Grèce, par exemple), est elle aussi traitée. C’est évidemment du côté de Bruxelles que l’impact de la transposition de la société coopérative européenne dans la législation nationale est abordé.
Le chapitre sur la France porte sur les passerelles entre les formes sociales coopératives et les formes sociales non coopératives, ce qui permet d’aborder les questions de la hiérarchie des normes et de la transformation statutaire (d’une structure coopérative vers une forme coopérative, d’une structure coopérative vers une forme non coopérative). Le cas luxembourgeois est édifiant en matière d’assimilation de la coopérative à la société commerciale, puisque celle-ci est « totale » selon David Hiez, qui qualifie de libéral le système proposé pour les coopératives par le Grand Duché et va jusqu’à parler d’« irréalité coopérative ».
L’intéressante présentation espagnole semble très complète et offre une vision précise de la législation en vigueur et sur le mode de fonctionnement des coopératives espagnoles (gouvernance, fonds propres, instruments financiers, gestion des excédents, etc.). Les principales tendances dans la réglementation des coopératives soulignées dans l’article sont également éclairantes, avec notamment la transformation du capital social variable en capital fixe non remboursable (solution espagnole pour répondre à la problématique IAS), la réduction des montants affectés aux réserves impartageables ou bien encore « l’élargissement de la visée sociale des coopératives au-delà des intérêts de leurs associés ».

Le mutualisme

Il y a aussi un élément très important qui traverse plusieurs contributions, c’est la question du mutualisme. En France, on rattache les pratiques mutualistes à seulement deux coopératives : le Crédit mutuel et le Crédit agricole, du fait de leur modèle « Raiffeisen ». Si certains développent une vision mutualiste de leur forme coopérative (comme Stéphane Veyer et Joseph Sangiorgio, qui avancent « l’idée qu’une troisième génération de coopératives d’activités et d’emploi voit actuellement le jour qui mènera ces dernières à devenir enfin ce qu’elles sont: une forme nouvelle de mutualité, dont l’objet est la protection mutuelle des parcours professionnels (1) »), cette réflexion mériterait d’être alimentée par toutes les familles coopératives. Dernière précision : c’est un ouvrage de droit comparé et pas de pratiques comparées. Il y a parfois (souvent ?) un écart (négatif, mais aussi positif) entre le texte et la réalité. Puisque David Hiez et l’ensemble des contributeurs éveillent chez leurs lecteurs l’envie d’en savoir plus sur la réalité coopérative européenne, il est de leur responsabilité de donner rapidement de quoi rassasier leur curiosité en publiant un ouvrage exhaustif… Un mouvement coopératif européen fort et attractif repose d’abord sur une parfaite connaissance des pratiques de chacun et donc sur une grille de lecture commune.

Rémi Laurent



(1) In « Les coopératives d’activités et d’emploi : un exemple de construction d’une innovation sociale », Projectics-Proyéctica-Projectique, n° 1, 2009, p. 51-61.