« Planète coopérative » célèbre la loi de 1947 et l’attractivité de son modèle

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Une célébration mais aussi une réflexion.

Alors que la loi du 10 septembre 1947 définissant le statut coopératif fêtait ses 70 ans, Coop FR, qui représente les différentes fédérations coopératives, a souhaité montrer l’unité et la diversité des coopératives françaises, offrant par la même occasion un tour d’horizon des questions qui se posent à elles et au mouvement. Quels sont les secteurs d’activité les plus émergents ? Le droit coopératif français offre-t-il toutes les solutions et facilités attendues aux entrepreneurs ? Comment mieux intégrer les principes coopératifs aux normes produites par les grandes organisations internationales ?
De nombreuses questions ont été abordées à l’occasion de l’événement « Planète coopérative : les coopératives pour un monde meilleur » qui s’est déroulé les 13 et 14 septembre à la Maison de la Chimie, à Paris. En trois séquences d’une demi-journée chacune, une trentaine d’invités, des experts d’envergure internationale et des acteurs de terrain, se sont succédé en six tables rondes didactiques pour témoigner et dialoguer entre eux et avec le public, illustrant au passage qu’il n’y a pas de prêt à penser coopératif.

L'essor de nouveaux secteurs
La France reste la terre historique des coopératives de production (2 222 Scop et 47 508 salariés en 2014) et un fleuron de la coopération agricole (2 750 coopératives et 160 000 salariés en 2014) mais de nouveaux secteurs sont en essor. En matière de coopération de consommation (35 ­coopératives en 2014), la vingtaine d’initiatives en cours ne se limite pas à la duplication des opérations de type La Louve, en zone urbaine. Ainsi, l’épicerie Macoop la vie au vert a pu expliciter son projet dans un environnement « néorural ». Parmi les coopératives d’artisans (424 coopératives en 2014), La fabrique de la Goutte d’Or (XVIIIe arrondissement de Paris) a présenté comment elle aidait les couturiers à sortir de l’économie informelle en structurant leur réponse à des appels d’offres dans le domaine de la mode (avec l’appui d’un pôle territorial de coopération économique). La coopérative HLM Cooprimo était à la tribune avec Graine de Bitume, une toute jeune coopérative d’habitants grenobloise « nouvelle génération » qui souhaite mixer les générations et les niveaux de revenus dans un projet immobilier échappant aux mécanismes de la ­spéculation. La société coopérative d’intérêt collectif (Scic) Enercoop a présenté son réseau de neuf coopératives locales qui fournit en électricité renouvelable 42 500 clients, dont une centaine de collectivités.

Des enjeux de visibilité
Dès la seconde séquence dédiée aux atouts nationaux et internationaux de la coopé­ration, cette mise en lumière des Scop, des CAE et surtout des Scic a paru essentielle : de nouveaux concepts d’entreprise sociale se développent, tel le nouveau label américain d’entreprise au statut de société anonyme B-corp, revendiquant à la fois le profit et l’utilité sociale, réinventant d’une certaine façon la coopération tout en se dédouanant de la gouvernance démocratique et de la distribution des richesses produites. La table ronde consacrée à la « boîte à outils juridiques » de la coopération a dès lors très vite pointé la situation française : le droit coopératif y est certes très développé, riche et précis, mais aussi complexe. Sous le droit civil se trouve le droit commercial (et le droit des sociétés) dont relève la loi de 1947 au titre d’une exception, loi qui elle-même comporte de nombreuses spécificités sectorielles (Scic, CAE, Scop, etc.).

Faut-il ­s'implifier le droit coopératif ?
Une simplification permettrait aux pouvoirs publics de rédiger des réglementations qui intègrent les coopératives dans leur champ d’application, ce qui n’est pas toujours le cas (par exemple, le CICE s’applique aux TPE-PME, mais pas aux coopératives). De plus, une simplification faciliterait l'entreprenariat sous statut coopératif. Pour autant, la réponse n’est pas simple car un droit coopératif plus synthétique comporte un risque, celui d’un certain alignement du droit coopératif sur le droit civil et commercial lorsque le juge, ne trouvant pas de réponse à un cas particulier, serait amené à se référer aux Codes supérieurs. Ces enjeux sont apparus en filigrane des échanges entre Daniel Hustel, avocat d’affaires, Paul Le Floch, professeur à l’université Paris 1, Laurent Gros, spécialiste du droit coopératif chez Trinity avocats et Patrick Prud’homme, directeur des affaires juridiques et fiscales du Crédit Coopératif.

Quelle reconnaissance à l’international ?
La table ronde sur les forces et les enjeux des principes coopératifs à l’international a permis sans doute, mieux que tout autre, de saisir les atouts de la planète coopérative et les questions qui se posent à elle. Marie-Anne Frison-Roche, professeur de droit économique et financier à Sciences Po Paris, a développé dans une intervention d’ouverture l’idée selon laquelle, depuis 2008, pour sauver le marché financier du chaos et de l’effondrement, les etats et les organisations internationales ont entrepris une captation des valeurs coopératives qui aboutit à une mutation inédite des règles du marché. Ainsi, l’Union bancaire, réalisée dans l’Union européenne en 2014 repose sur une vision très nouvelle : la faillite d’une banque n’est plus une aubaine pour les autres concurrents sur le marché. Elle est proscrite, au nom de la solidarité, de la coopération. Dès lors, les valeurs et les idées de coopération, ainsi récupérées, seraient désormais le bastion avancé du droit des marchés capitalistiques en quête de survie. Quelle place et quel rôle peuvent avoir les coopératives face à de telles tensions et opportunités ? Patrick Klein, chef de l’équipe économie sociale à la Commission européenne (DG Grow), Simel Esim, cheffe de l’unité des coopératives de l’Organisation internationale du travail (OIT), David Rogers, membre du comité des principes de l’Alliance coopérative internationale (ACI) et conseiller municipal de la circonscription de Ealing (Londres) et Hagen Henry, professeur de droit à l’université d’Helsinki, ont pu faire le point sur la reconnaissance internationale des principes coopératifs (au sens de la Charte de 1995) de façon plus concrète. La planète coopérative internationale compte 1,3 milliard de membres et la moitié de la population dépend des coopé­ratives pour améliorer son sort. Pour l’heure, la recommandation de l’OIT de 2002, qui reprend une déclaration de l’ACI, est la seule reconnaissance de nature juridique, susceptible d’être invoquée de façon contraignante. « Pour avancer, il faut mettre dans les statistiques des organisations internationales des indicateurs capables de mesurer et montrer le rôle bénéfique des coopératives dans l’éducation, le travail, l’agriculture, l’alimentation », a fait remarquer la représentante de l’OIT.

Quant à la reconnaissance internationale à venir, elle ne doit pas envisager les coopératives uniquement comme un remède à la pauvreté ou comme un palliatif au désengagement des Etats-nations. Au terme d’une dernière séquence de deux tables rondes consacrée à la dimension utopique de la coopération et de sa vocation à transformer la société, Jean-Louis Bancel, président de Coop FR, a pu insister sur les trois principes coopératifs fondamentaux dans lesquels toutes les coopératives françaises se reconnaissent : l’autonomie (l’indépendance) du modèle coopératif vis-à-vis des autres modèles économiques ; l’intercoopération au sein du monde coopératif et plus largement avec l’ESS ; l’engagement envers la communauté, notamment à travers la contribution de la coopération au développement durable.
La rencontre, par la richesse et la vitalité des éclairages, aura mérité son titre « Les coopératives pour un monde meilleur ».

Lisa Telfizian