Débat sur les porosités de l’ESS dans le secteur sanitaire et social lors des rencontres de l’ADDES

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Dans le cadre des orientations 2022 de son conseil scientifique, l’ADDES a inauguré le 18 octobre 2022 un nouveau cycle de rencontres interrogeant les « porosités de l’ESS ». Avec ce cycle, l’ADDES renoue avec son « ADN », en mettant en débat lors de ses conseils scientifiques des travaux issus de la recherche ou de praticiens, afin de les présenter ensuite au grand public sous la forme de rencontres dédiées. Ce nouveau cycle vise à interroger les tensions qui existent entre l’ESS et les autres organisations socio-économiques (les entreprises privées lucratives, les pouvoirs publics, les communs, etc.). Chaque thématique de rencontre préalablement définie en conseil scientifique traitera le sujet des porosités, soit sous un angle sectoriel (sanitaire et social, agriculture et alimentation, etc.), soit de manière transversale (plateformes numériques, outils de gestion, etc.).
La première rencontre organisée en partenariat avec la Fondation Crédit Coopératif, l’Institut Montparnasse et le Crédit Coopératif, a eu lieu le 18 octobre 2022 sur le thème des « porosités de l’ESS dans le secteur sanitaire et social ». Initialement prévue à la MACIF (Paris), cette rencontre a dû basculer en distanciel compte-tenu d’un mouvement de grève dans les transports. Malgré ce contexte, la rencontre a réuni environ 70 participants autour de notre panel d’intervenants. Après  une riche introduction de Christophe Vernier (Fondation Crédit Coopératif) qui est revenu sur le sens du terme « porosité », Nadine Richez-Battesti et Éric Bidet ont animé les débats de la table ronde avec les interventions d’Henry Noguès (Université de Nantes), Morgane Dor (Association de lutte contre l’exclusion) – excusée mais intervenante sur le podcast, Hervé Defalvard (Université de Marne-la-Vallée) et de Yannick Lucas (Mutualité Française).

Des évolutions récentes qui impactent le secteur sanitaire et social privé à but non lucratif
Nos intervenants sont d’abord revenus sur les évolutions récentes qui impactent les organisations du privé non lucratif dans le champ sanitaire et social. Henry Noguès et Morgane Dor rappellent que les associations ont été pionnières dans les réponses apportées aux besoins sanitaires et sociaux et dans leur prise en charge. Les « spécificités méritoires » (Bloch-Lainé) des associations sont nombreuses : aptitude à déceler de nouveaux besoins, capacité à mobiliser des « gratuités » par le don et le bénévolat qui permettent de développer des activités peu rentables, rôle d’équilibrateur  politique (contre-pouvoir), contributions à la démocratie économique (gouvernance), etc. À partir des années 2020, la construction européenne renforce la marchandisation y compris pour les services  d’intérêt général, ce qui se traduit en France par une mise en concurrence de plus en plus systématique. Ce recours croissant aux procédures marchandes (passage des subventions aux appels d’offres  publics) sous l’influence du« Nouveau management public », menace in fine la biodiversité organisationnelle dans le champ et entraîne donc la banalisation des associations. Pour Yannick Lucas, les mutuelles sont, elles, impactées par deux phénomènes : le développement de la concurrence et une régulation de plus en plus forte de l’activité d’assurance complémentaire santé  avec un encadrement des garanties proposées et plusieurs tentatives de contrôler les tarifs.
Ces deux phénomènes ont entraîné une forte concentration du secteur mutualiste, confirmant ainsi son « caractère inéluctable », alors que l’absence d’actionnaires semblait proté- ger les mutuelles. Cette concentration verticale (constitution de groupes mutualistes) se double d’une concentration horizontale (intégration de mutuelles dans des groupes assurantiels ou paritaires). Enfin, Hervé Defalvard est revenu sur la notion de « communs sociaux », comme alternative à la régulation  néolibérale dominante de l’économie entre les marchés financiarisés et l’État. Entre la banalisation et la financiarisation, le chercheur identifie une voie possible d’ESS en commun, qui s’appuie sur des modes de régulation centrés sur la coopération : ce sont par exemple des Pôles territoriaux de coopérations économiques (PTCE), des expérimentations comme Territoire zéro chômeur de longue durée (TZCLD), des sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC). Cette ESS en commun hybride l’ESS avec des partenaires en dehors de l’ESS (entreprises, acteurs publics, société civile, etc.).

Quels défis demain pour garantir l’identité de l’ESS ?
Dans les mutuelles, le phénomène de concentration a considérablement diminué le nombre de militants ainsi que la proximité avec les territoires. Les mutuelles cherchent à renforcer leurs liens aux territoires et réaffirment leur projet politique et leur appartenance à l’ESS. Les acteurs privés non lucratifs jouent un rôle socio-politique et ne doivent pas être réduits à leur seule fonction d’opérateur économique. Si la régulation concurrentielle portée par le modèle d’entreprise unique de l’Union européenne continue d’être appliquée (le principe de neutralité de l’UE n’est pas respecté en la matière), les associations seront soit fortement pénalisées (car elles n’ont pas accès aux capitaux comme les sociétés), soit condamnées à imiter le modèle de l’entreprise capitaliste (isomorphisme). Pour faire face, les acteurs privés lucratifs peuvent compter sur plusieurs opportunités. D’une part, le dynamisme de la vie associative  qui est important en France. Les spécificités associatives sont portées et défendues par les réseaux et fédérations notamment en direction des pouvoirs publics. D’ailleurs, certains marchés doivent être mieux régulés pour éviter le risque de baisse de la qualité de services (comme l’a révélé l’affaire Orpéa dans les EPHAD). D’autre part, les acteurs à but non lucratif peuvent renforcer leurs coopérations pour contenir la mise en concurrence imposée par les marchés publics, il y  a un enjeu à renforcer les alliances, avec les pouvoirs publics et avec des acteurs privés (responsabilité territoriale des entreprises). L’enjeu démocratique est bien de conserver une pluralité d’opérateurs économiques.

Les prochaines rencontres de l’ADDES et leur valorisation
La prochaine rencontre aura lieu le 31 janvier 2023 après-midi à la MGEN (Paris) et interrogera les liens entre l’ESS et les plateformes numériques (partage de la valeur, place du numérique, gouvernance des plateformes, etc.). Cette rencontre sera aussi l’occasion de récompenser le lauréat 2022 du Prix des mémoires Tremplin-Recherche 2022, organisé en partenariat avec le CJDES. La suivante  aura lieu le 6 juin 2023 et portera sur les porosités de l’ESS dans les questions agricoles et alimentaires. Dans le cadre du partenariat avec l’Institut Montparnasse, pour valoriser de manière synthétique les débats proposés, chacune de ces rencontres donne lieu à l’édition de podcasts dans la collection « Bâtissons des futurs solidaires ».
Pour plus d’informations : https://addes-asso.fr/

Benjamin Roger
Délégué général de l’ADDES